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François Boucq décode Léonard de Vinci

Le Musée de la Franc-Maçonnerie de Paris organise jusqu’au au 6 octobre 2019 une exposition du dessinateur de bandes dessinées François Boucq : Léonard décodé, La cathédrale derrière le tableau, Humanisme et symbolisme dans la pensée de la Renaissance.

L’exposition explore les notions d’humanisme et de symbolisme dans la pensée de la Renaissance.

Cette exposition a pour but de présenter ce qu’est la géométrie sacrée à travers l’œil de François Boucq, car c’est à partir du moment où l’on est détenteur du langage de la géométrie que l’on peut commencer à entreprendre l’investigation d’un tableau comme La Cène de Léonard de Vinci ou bien Les Noces de Cana de Véronèse.

Boucq : Léonard décodé propose ainsi de découvrir ce qui se trouve derrière les œuvres - des peintures de la Renaissance à la bande dessinée – et de nous fournir les clefs pour les analyser.

Le symbolisme dans la bande-dessinée

Côté BD, l’exposition présente une sélection parmi les plus belles des… 238 planches de « Face de lune », la grande saga mêlant tradition et anticipation scénarisée par Jodorowsky et dessinée par Boucq dans les années 1990 ; une histoire inédite mettant en scène Léonard de Vinci à la manière des Rubrique-à-brac (22 planches) et un cours où « Maître Léonard » explique à ses élèves comment dessiner Astérix.

Le symbolisme de Léonard de Vinci : quatre tableaux décryptés

François Boucq propose quatre exemples où l’œil du dessinateur repère la structure géométrique cachée des œuvres de Léonard de Vinci. Le visiteur découvre ainsi, au travers d’une série de calques, la construction géométrique en train de se mettre en place.

Parallèlement à l’exposition, le Musée présentera un film de 20 minutes réalisé par Ludovic Fortin. Une plongée dans l’univers de François Boucq qui lui a ouvert son atelier. Muni d'un crayon et d'un calque, le dessinateur y décrypte très simplement les intentions des grands maîtres. Et il nous permet de découvrir la nature du nombre d’or.

La géométrie sacrée : un langage universel.

Nous avons tous un rapport à la géométrie, puisque la construction de nos corps, de nos ADN, sont basés sur des constructions géométriques internes analogues que l’on retrouve dans notre manière de regarder le monde. Quand on regarde une fleur, notre corps reconnaît l’étoile à cinq ou six branches qui s’y trouve.

C’est un langage universel qu’il faut décoder. Ces éléments se retrouvent à l’intérieur des tableaux sans même que l’on s’en rende compte.

Pendant notre cursus scolaire, nous découvrons la géométrie comme étant un moyen d’avoir accès aux mathématiques, mais ce n’est qu’un aspect de la réalité. Les figures géométriques fondamentales se retrouvent dans toutes les traditions : le carré, le triangle, l’étoile à cinq branches, celle à six branches, le cercle, la croix… On les trouve partout avec des utilisations parfois un peu plus spécifiques, mais toujours avec un contenu symbolique. C’est un langage universel.

François Boucq s’est ouvert à la géométrie sacrée par le biais de plusieurs rencontres, dont celle d’un chanoine d’Auch. Après celles-ci, il s’est mis à étudier les œuvres sous un nouvel éclairage en réalisant que de nombreuses œuvres de la Renaissance ou du Moyen-Age étaient élaborées à partir de constructions géométriques sous-jacentes.

« Quand on en a les clés, cela devient passionnant à comprendre. C’est à la fois simple, ingénieux et intelligent, c’est incroyable. » (F. Boucq)

La perspective propose un premier élément structurant pour analyser une œuvre. Vient ensuite la proportion, autre élément structurant et qui figure déjà dans le langage de la géométrie, à travers des figures comme le triangle, et surtout le pentagone.

À partir de ces éléments, on explore le tableau. A mesure de décompositions successives, on s’aperçoit que cette structure est semblable à celle d’une cathédrale.

Présence et rôle du symbolisme dans la bande dessinée

On peut penser que l’utilisation du symbolisme est un procédé plutôt éloigné de la bande dessinée, mais, si l’on se donne la peine de regarder les planches de certains dessinateurs, comme François Boucq, on finit par reconnaître que c’est au cœur de leur façon de concevoir celles-ci, et que cela agit même à l’insu du lecteur.

Il en résulte que le lecteur pourra lire l’album comme une histoire avec son intrigue et ses rebondissements, mais s’il s’attarde sur le dessin, il pourra aussi décrypter certaines planches selon des diagrammes symboliques.

Dans la bande dessinée réaliste, un élément fondamental de la composition d’une image est la perspective. La première partie de l’enquête d’un chercheur d’art traditionnel passe ainsi par la découverte du langage symbolique de la géométrie.

Plusieurs des couvertures du Bouncer, de Face de Lune ou certaines cases ou images de Bouche du Diable ont été composées selon ce principe qui remonte à l’enseignement traditionnel des confréries artisanales dont Dürer et Léonard de Vinci faisaient partie.

François Boucq réalise aussi d’ailleurs souvent pour ses cases des crayonnés incluant les figures géométriques qui organisent de façon sous-jacente les images.

L’analyse de La Cène : le Christ comme point de fuite

Le point de fuite est le moyen par lequel on aide le spectateur à l’identification. C’est important, car l’identification est au cœur de la conception traditionnelle de l’art. Celui qui regarde une œuvre ne doit pas regarder celle-ci comme quelque chose d’extérieur à lui, mais, au contraire, participer à ce qu’elle est en vue de s’y identifier. Elle suppose une rupture de la dualité sujet-objet.

À partir du moment où l’on a ce point, l’effet est celui d’un caillou que l’on jette dans l’eau : le reste du tableau va se propager comme des ondes. Le point de fuite crée un point original à partir duquel le tableau se déploie d’une manière géométriquement proportionnelle au nombre d’or. Il ne restera plus qu’à étudier ces figures, la façon dont elles s’entrelacent et le sens qui en résulte.

Dans La Cène, toutes les lignes de perspective convergent sur le Christ. C’est lui le point de fuite, le centre. Celui qui regarde le tableau est comme installé à l’endroit le plus adapté pour s’identifier au Christ. Le linteau de la porte quant à lui permet de trouver le départ de l’étoile à cinq branches. Toutes les constructions et les autres étoiles se développent à partir de celle- ci.

Et ce qu’il faut savoir, c’est que ces formes géométriques sont induites chez le spectateur !

S‘il a commencé́ dans l’illustration de presse avec des caricatures pour des magazines aussi renommés que Le Point, L’Expansion ou Prive,́ c’est dans la bande dessinée que Francois Boucq explose véritablement.

De son expérience passée, il retire un goût prononcé pour les visages expressifs et le dessin fouillé, magnifié par un sens peu commun du cadrage et de la mise en scène. Il se fait connait̂ re pour ses récits humoristiques, où l’absurde le dispute souvent à la parodie.

Il crée le personnage de Jérôme Moucherot, un agent d’assurances pas tout à fait comme les autres, parcourant la jungle de l’existence en costume léopard. Doué d’une capacité de travail peu commune (il lui est arrivé de dessiner jusqu’à deux planches par jour, sans jamais renoncer à la qualité qui a fait sa réputation), Francois Boucq délaisse volontiers l’humour pour se consacrer à des récits plus réalistes.

Il adapte ainsi le romancier américain Charyn (La Femme du magicien, Bouche du diable, Little Tulip), crée Face de Lune dans (À Suivre) avec Jodorowsky – avec qui il explore ensuite le western dans les pages de Bouncer, ou les services secrets du Vatican avec Sente (Le Janitor). Héritier direct d’un Giraud, Boucq a ouvert des portes dans le dessin réaliste. Au fil des années, cette synthèse entre caricature et rigueur, lisibilité et précision du dessin a donné naissance à un style unique, qui lui permet de faire vivre tous les genres de récit avec le même brio.

La visite de l’exposition est accompagnée par un livre-catalogue, Le petit Léonard décodé, publié aux Éditions i. De forme humoristique, entre le magazine féminin et la revue illuminati, cet ouvrage insolite réunira bandes dessinées inédites réalisées pour l'occasion, dessins, parodies et contributions diverses et variées.

 

Musée de la Franc-Maçonnerie 16 Rue Cadet

75009 Paris

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