Liste des livres de Abeille (Jacques)
Jacques Abeille (1942–2022)
Écrivain du rêve, de l’ombre et de l’imaginaire
Jacques Abeille est né en 1942 à Lyon. Fils d’un résistant mort en déportation, il grandit dans un environnement empreint de silence, de non-dits et de douleurs enfouies. Cette atmosphère marquera profondément son œuvre, tout entière tendue entre effacement et révélation, entre désir d’échapper au réel et besoin de l’interroger.
Agrégé de philosophie, peintre à ses heures, Abeille est un écrivain secret qui publie tardivement. C’est en 1982 qu’il fait paraître son chef-d’œuvre, Les Jardins statuaires, dans la collection “Présence du futur” chez Denoël. Ce roman ouvre un vaste cycle, le Cycle des Contrées, univers imaginaire dont il explore les provinces, les marges et les légendes. Œuvre-monde aux accents borgésiens, volontiers comparée à celles de Julien Gracq ou Italo Calvino, ce cycle fait de lui un maître de la littérature de l’imaginaire, loin des canons de la fantasy anglo-saxonne.
Jacques Abeille, dans une langue limpide et grave, tisse des récits où la fiction devient un acte de résistance contre l’ordre établi, contre le discours figé, contre le poids du visible. Il revendique une littérature de l’inconnu, du clandestin, du fragmentaire. Écrivain du refus, du détour et du silence, il affirme sa méfiance envers les dogmes, les catégories, et les mécanismes du pouvoir, y compris littéraires.
Longtemps ignoré par le grand public, Abeille trouve une reconnaissance tardive grâce à la redécouverte de son œuvre par les éditions Attila, puis Le Tripode, qui republient et prolongent son univers dans les années 2010. Ses récits, comme Le Veilleur du jour, La Barbarie, ou Les Voyages du fils, prolongent une méditation sur le langage, le corps, le désir, la mémoire — et surtout, la liberté.
En marge, il publie également des écrits plus érotiques sous pseudonyme (Bartleby, Mon amour, La trilogie des femmes), mais toujours dans une veine littéraire et stylisée, interrogeant le rapport entre le corps et le texte.
Jacques Abeille meurt en janvier 2022. Aujourd’hui encore, son œuvre demeure un continent secret, une terre d’exil et de beauté, pour celles et ceux qui croient que la littérature est un lieu où l’on peut encore “sauver quelque chose du monde”.