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Jean-Baptiste-François Gigot d’Orcy, mécène et collectionneur au service des sciences naturelles.
Jean-Baptiste-François Gigot d’Orcy, figure méconnue mais influente du XVIIIe siècle, incarne parfaitement l’esprit de son époque, à la croisée des sciences naturelles et des finances. Né à Sens le 8 janvier 1737, dans une famille aux relations prestigieuses, il fut baptisé le lendemain à l’église Saint-Romain. Son père, Pierre-Symphorien Gigot, occupait une position respectée comme directeur des aides de Sens, et sa mère, Jeanne Dantan-Satin, était liée par alliance à des personnalités influentes, telles que le fermier général André Haudry.
Les débuts d'une carrière brillante
Jean-Baptiste-François Gigot d’Orcy épousa en 1765 la fille d’un avocat au Parlement, lui-même conseiller des finances du duc d’Orléans. Cette alliance lui ouvrit les portes du monde des finances, et en 1773, il fut nommé receveur général des finances de Châlons-en-Champagne. Il ne se contenta pas de cette carrière administrative ; il investit également dans diverses entreprises, notamment des sociétés minières, des armements, ainsi qu’une manufacture de tabac à Toulouse.
Cependant, ce qui distingue véritablement Gigot d’Orcy, c’est sa passion pour l’histoire naturelle. Très tôt, il se consacra à la collecte et à l’étude des insectes, une discipline alors en plein essor. En 1780, il acquit l’hôtel particulier du banquier Jean Cottin, place Vendôme, où il installa un cabinet d’histoire naturelle d’une rare richesse. Ce cabinet, vanté par ses contemporains, regroupait des spécimens d’une qualité et d’une diversité exceptionnelles, allant des insectes aux papillons, en passant par des oiseaux rares, des coquillages et des minéraux.
Un mécène des sciences naturelles
Gigot d’Orcy ne se contenta pas d’accumuler des collections. Il contribua de manière significative à la diffusion du savoir scientifique. Il finança la publication de plusieurs ouvrages de référence, dont Les Papillons d’Europe, une œuvre monumentale en huit tomes, réalisée entre 1779 et 1792, qui demeure un des plus beaux ouvrages français jamais réalisés sur le sujet. Les illustrations gravées et peintes avec minutie capturent l’essence même des papillons, tant européens qu’exotiques.
L’intérêt de Gigot d’Orcy pour l’entomologie l’amena à financer également L’Entomologie ou Histoire naturelle des insectes, publiée à partir de 1789 par Guillaume-Antoine Olivier. Ce projet de grande envergure ne se limita pas à la seule description des insectes : Gigot d’Orcy mit à disposition d’Olivier son cabinet et sa bibliothèque, et finança ses voyages en Angleterre et en Hollande pour enrichir l’ouvrage.
Une bibliothèque et un cabinet d’exception
En plus de son cabinet d’histoire naturelle, Gigot d’Orcy possédait une bibliothèque considérable, riche en ouvrages rares et précieux sur les sciences. Sa collection de livres et d’objets scientifiques était connue des spécialistes de toute l’Europe. Après son décès, la Convention nationale décréta, en 1794, la vente publique de sa bibliothèque et de son cabinet. Si la vente des livres se fit rapidement, celle du cabinet d’histoire naturelle fut retardée de dix ans, témoignant de la valeur exceptionnelle des pièces qu’il renfermait.
Henri Boissier, recteur de l’Académie de Genève, acquit une grande partie de cette collection en 1804. Le cabinet de Gigot d’Orcy comptait parmi les plus prestigieux d’Europe, regroupant notamment des spécimens rares de cristallisations de métaux, des fossiles, des madrépores, ainsi que des collections de papillons et d’insectes remarquablement bien conservées. Sa réputation était telle que des modèles issus de son cabinet furent utilisés pour des ouvrages de référence en minéralogie, comme ceux de Romé-de-Lille.
L’héritage d’un savant mécène
Bien que Gigot d’Orcy soit décédé en 1793, sans postérité, son héritage perdure à travers les ouvrages qu’il a financés et les collections qu’il a constituées. Ses frères furent les héritiers de ses biens, mais c’est surtout la postérité scientifique qui garde mémoire de cet homme passionné. Son cabinet d’histoire naturelle, où il avait rassemblé avec patience et minutie des trésors venus du monde entier, témoigne de son engagement pour les sciences naturelles.
En conclusion, Jean-Baptiste-François Gigot d’Orcy incarne une figure marquante de la fin du XVIIIe siècle, où les passions pour les sciences naturelles, l’érudition et les mécènes éclairés se croisaient. Sa collection d’insectes et d’ouvrages, ainsi que ses investissements dans les sciences, en font un personnage digne de figurer parmi les grands bienfaiteurs des sciences naturelles, aux côtés des Buffon et Romé-de-Lille. Si les livres anciens et les cabinets de curiosités fascinaient alors, c’est grâce à des hommes comme lui que ces collections ont perduré et nourri le savoir des générations suivantes.
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