La redécouverte d'une partition oubliée de Mozart : une œuvre de jeunesse révélée.

Sous une apparente banalité se cachait une découverte exceptionnelle : une partition inédite attribuée à Wolfgang Amadeus Mozart. Ce trésor musical a été révélé grâce aux travaux de chercheurs qui préparaient une nouvelle édition du catalogue Köchel, un répertoire chronologique des œuvres du compositeur autrichien, établi pour la première fois par Ludwig von Köchel (1800-1877). Ce dernier, écrivain et éditeur, avait entrepris la titanesque tâche de classer toutes les œuvres de Mozart, donnant naissance au célèbre catalogue qui porte désormais son nom.

Une trouvaille dans la collection Carl Ferdinand Becker

La partition en question, non signée, était conservée au sein de la collection de Carl Ferdinand Becker, un musicologue et compositeur allemand du XIXe siècle. Bien que le document ne porte pas de nom d’auteur, l’expertise musicale des chercheurs a permis de l’attribuer à Mozart. Selon les estimations des spécialistes, la composition daterait de la fin des années 1760, alors que Mozart n'était encore qu'un enfant prodige. Né en 1756, il aurait été âgé de dix à quinze ans lors de la création de ce morceau. La partition aurait donc été écrite avant son premier voyage en Italie en 1769, un événement marquant dans la vie du jeune compositeur.

Une œuvre précoce : la « Ganz kleine Nachtmusik »

Ce morceau, désormais intitulé « Ganz kleine Nachtmusik » (« Toute petite musique de nuit »), apparaît dans le nouveau catalogue sous la cote KV 648. Bien que ce titre évoque la célèbre « Petite musique de nuit » (KV 525), il s'agit ici d'une œuvre distincte. La « Ganz kleine Nachtmusik » se compose de sept mouvements pour un trio à cordes, avec une durée totale de 12 minutes. Cette pièce, qui témoigne de la précocité du génie mozartien, offre une nouvelle perspective sur les premières années créatives du compositeur.

Une publication historique par Breitkopf & Härtel

Soixante ans après la dernière édition du catalogue Köchel, la maison d'édition Breitkopf & Härtel, l’un des plus anciens éditeurs de musique au monde, a dévoilé la version mise à jour de cette référence incontournable. Cet événement majeur s'est déroulé en collaboration avec la Fondation Internationale Mozarteum, une institution autrichienne dédiée à la préservation et à la promotion de l’œuvre de Mozart.

Pour célébrer cette réédition, la « Ganz kleine Nachtmusik » a été interprétée pour la première fois depuis des décennies lors d’une présentation officielle à Salzbourg, le 19 septembre dernier. Cette ville, lieu de naissance de Mozart, a ainsi vibré au rythme des notes oubliées d’un enfant prodige, redécouvertes après plus de deux siècles.

Une partition mystérieuse

Bien que la partition retrouvée ne soit pas un manuscrit original de la main de Mozart, elle représente une précieuse reproduction, datant probablement des années 1780, soit environ une décennie avant la mort du compositeur en 1791. Rédigée à l’encre brune, cette copie anonyme suscite l'intérêt des musicologues. Comment une telle œuvre a-t-elle pu rester cachée si longtemps ? Qui a pris la peine de reproduire cette musique à une époque où Mozart connaissait déjà une grande renommée ?

Ces questions, encore sans réponses précises, ajoutent une aura de mystère à cette découverte. Toutefois, la qualité et la précision de l'exécution du trio à cordes confirment que cette composition, même s'il s'agit d'une reproduction, est indubitablement de la main de Mozart.

Une renaissance musicale à Leipzig

Le public a eu l’occasion de découvrir ce morceau ce 21 septembre 2024, lors d’une représentation gratuite à l’opéra de Leipzig. Cette seconde interprétation vient couronner la découverte et offrir une ultime célébration de la richesse de l’œuvre de Mozart. Leipzig, ville chargée d’histoire musicale, et qui abrite l'une des plus riches bibliothèques de partitions du monde, se prête parfaitement à cet hommage.

Les livres anciens et la transmission du patrimoine musical

Cette redécouverte est également un bel exemple du rôle essentiel que jouent les livres et les manuscrits anciens dans la transmission du patrimoine artistique. En effet, les bibliothèques et collections privées, souvent discrètes, recèlent des trésors inattendus qui continuent d’alimenter notre connaissance des grands compositeurs. La collection Carl Ferdinand Becker en est un exemple frappant. Bien que des œuvres majeures de Mozart soient bien connues, d'autres partitions, parfois mineures ou oubliées, demeurent dissimulées dans les rayonnages poussiéreux de ces établissements.

Les livres anciens, qu'il s'agisse de manuscrits originaux ou de reproductions, ont cette capacité unique de traverser les siècles, de survivre aux époques tumultueuses et de nous permettre, aujourd’hui encore, d’entendre la voix des génies du passé. Ils sont les gardiens de notre mémoire musicale et culturelle, et leur étude, souvent minutieuse, nous permet de redécouvrir des pans entiers de notre histoire.

La découverte de la « Ganz kleine Nachtmusik » est plus qu’une simple anecdote musicale. Elle souligne l'importance de la recherche musicologique et du travail des bibliothèques dans la conservation et la mise en valeur du patrimoine culturel. Mozart, ce génie universel, continue, plus de deux siècles après sa mort, à nous émerveiller et à nous surprendre. Grâce à cette redécouverte, nous sommes invités à plonger dans l’univers du jeune compositeur, à un âge où, déjà, il maîtrisait l’art de la composition avec un talent inégalé.