La vente de la collection Harry Dewit chez Elsen : un triomphe pour la numismatique.

Le mois de juin dernier a marqué un tournant pour le monde de la numismatique avec la dispersion de la collection Harry Dewit, organisée par la maison Jean Elsen & ses fils à Bruxelles. Cette vente aux enchères a suscité un engouement sans précédent, témoignant d’un regain d’intérêt pour les pièces de monnaie anciennes et rares. Avec plus de 95 % des lots vendus, cet événement s’inscrit comme un succès retentissant, non seulement pour la maison de vente, mais aussi pour la Société royale de numismatique de Belgique, bénéficiaire du legs de cette collection exceptionnelle.

Un héritage précieux pour la Société royale de numismatique de Belgique

Harry Dewit, passionné et membre éminent de la Société royale de numismatique de Belgique, a consacré sa vie à la préservation de l’histoire à travers les monnaies. En léguant l’intégralité de sa collection à cette société savante, il a permis à cette dernière de consolider ses ressources pour plusieurs décennies. Selon Pierre Petit, président de la Société, « cet héritage est un cadeau inestimable qui garantit la pérennité de nos activités et le rayonnement de la recherche numismatique en Belgique ».

Fondée en 1841, la Société royale de numismatique de Belgique est la deuxième plus ancienne du monde après la Royal Numismatic Society de Londres. Depuis sa création, elle a publié sans interruption (sauf durant les périodes de guerre) la Revue belge de numismatique, une référence dans le domaine. Ce legs, fruit de la générosité de Dewit, permet à la société de poursuivre ses travaux et de renforcer les liens entre ses membres à travers des activités collectives et conviviales.

Les pièces maîtresses de la vente

La collection Dewit contenait de nombreuses pièces rares qui ont capté l’attention des collectionneurs du monde entier. Parmi les lots les plus remarquables, un statère d’or de l’époque d’Alexandre le Grand (250-225 av. J.-C.) a suscité une véritable frénésie. Estimé initialement à 1.500 €, il a été adjugé à 6.000 €, soulignant l’attrait constant des pièces grecques anciennes pour leur qualité de frappe et leur richesse iconographique. Les statères d’Alexandre sont particulièrement prisés pour la représentation du conquérant macédonien et la finesse des détails, faisant de cette monnaie un véritable trésor historique.

Dans la catégorie des monnaies romaines, un denier frappé sous le règne de Caligula en 40 après J.-C. a lui aussi fait sensation. Estimé à 400 €, il a atteint la somme impressionnante de 3.800 €. Cette pièce est d’une rareté exceptionnelle, notamment en raison du court règne de Caligula, et son état de conservation en fait une perle rare. Cela démontre, une fois de plus, que les pièces impériales romaines fascinent toujours autant, des millénaires après leur création.

Trésors médiévaux et monnaies des Pays-Bas méridionaux

Parmi les lots les plus singuliers, le demi-vryman (ou bryman) frappé en mars 1377 sous Jeanne et Wenceslas, duc et duchesse de Brabant, à Maastricht, a suscité un vif intérêt. Estimée à 1.500 €, cette monnaie médiévale a été adjugée à 3.800 €. Ce type de pièce, bien que moins connu du grand public, est particulièrement recherché par les collectionneurs spécialisés dans les monnaies des Pays-Bas méridionaux. La rareté de ces monnaies, combinée à leur importance historique, en fait des objets d’un grand intérêt pour les numismates chevronnés.

L’un des autres lots spectaculaires fut un double souverain frappé en 1793 sous le règne de François II à Bruxelles. Cette pièce en or, dont l’estimation se situait à 7.500 €, a finalement atteint 13.000 €. Les monnaies de cette période, issues des Pays-Bas méridionaux, sont particulièrement recherchées, et l’état de conservation remarquable de ce double souverain en a fait un objet de désir parmi les collectionneurs présents.

Les méreaux : une surprise inattendue

Une des surprises de cette vente fut la mise aux enchères d’un méreau de 1606, frappé par Melchior Waerbeeck à Anvers. Ces petites pièces, utilisées autrefois comme jetons dans les guildes ou les corporations, n’attirent généralement pas les sommets financiers. Cependant, ce méreau, estimé à seulement 100 €, a vu son prix s’envoler jusqu’à 6.000 €. Ce résultat inattendu souligne l’importance que les collectionneurs accordent à l’histoire derrière chaque objet numismatique, même les plus modestes en apparence. Les méreaux, véritables témoins de la vie sociale et économique de l’époque, sont désormais reconnus pour leur valeur historique.

Une philanthropie qui soutient la convivialité et la science

La collection Dewit a non seulement permis de récolter des fonds considérables pour la Société royale de numismatique de Belgique, mais elle a aussi consolidé l’héritage de son créateur. Dewit, selon les témoignages, était un homme d’une grande érudition et d’une extrême discrétion, qui plaçait l’amitié et les relations humaines au centre de ses activités. Son testament stipule d’ailleurs que les fonds générés par la vente doivent favoriser les liens entre les membres de la Société à travers des rencontres et des projets communs.

Cette vente historique est bien plus qu’une simple dispersion de pièces rares : elle incarne un geste philanthropique rare et un engagement pour l’avenir de la numismatique en Belgique. Grâce à Harry Dewit, la Société royale de numismatique de Belgique peut envisager l’avenir avec confiance, tout en continuant à tisser des liens humains autour d’une passion commune pour l’histoire monétaire.

La vente Dewit restera dans les mémoires comme un événement marquant, qui a non seulement mis en lumière des trésors numismatiques inestimables, mais a aussi renforcé les bases d’une tradition scientifique et conviviale autour de la numismatique belge et internationale.