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Le mystère du Gascon : à la recherche du maître relieur du XVIIe siècle.
Le monde de la reliure a connu au cours des siècles de nombreux artisans talentueux, mais peu ont marqué leur époque et laissé une empreinte aussi indélébile que Le Gascon, un relieur du XVIIe siècle dont le véritable nom demeure entouré de mystère. Considéré par beaucoup comme le plus grand relieur de son temps, et peut-être même de toute l'histoire de la reliure, Le Gascon a été un précurseur et un innovateur, apportant à cet art des techniques et des esthétiques qui continuent d'inspirer les relieurs modernes. Pourtant, en dépit de sa renommée, le véritable visage de ce génie reste inconnu, et nous ne disposons que de son surnom : Le Gascon.
L'énigme du Gascon
Qui était Le Gascon ? C'est une question qui a fasciné les historiens de l'art et les amateurs de reliures depuis des siècles. Ce que l'on sait de lui est à la fois peu et beaucoup. Actif dans la première moitié du XVIIe siècle, il jouissait déjà, de son vivant, d'une réputation exceptionnelle. Ses créations, caractérisées par une maîtrise technique sans égale et un sens esthétique d'une finesse rare, sont aujourd'hui parmi les plus recherchées par les collectionneurs et les bibliophiles.
Le Gascon est particulièrement reconnu pour ses innovations dans l'art de la reliure, notamment l'introduction du pointillé. Cette technique, qui consiste à créer des motifs complexes en utilisant de très petits points, a révolutionné la décoration des reliures. Ses entrelacs minutieux, ses filets délicats, réalisés avec des fers pointillés, témoignent d'un savoir-faire exceptionnel et ont donné naissance à des œuvres d'une exquise beauté. En outre, il semble que Le Gascon ait été le premier à recouvrir les gardes intérieures des reliures, une autre innovation qui contribue à sa légende.
Les hypothèses sur l'identité du Gascon
La véritable identité de Le Gascon a longtemps été l'objet de spéculations et de débats. Plusieurs hypothèses ont été avancées au fil des ans, mais aucune n'a pu être confirmée de manière définitive. Parmi les premières théories, celle proposée par le célèbre relieur Gruel est sans doute l'une des plus intéressantes. Gruel a suggéré que Le Gascon pourrait être en réalité Florimond Badier, un relieur d'origine gasconne. Cette hypothèse semblait séduisante, mais elle a été réfutée lorsqu'il est apparu que Le Gascon était déjà actif en 1622, une époque où Badier n'avait même pas encore commencé son apprentissage. Cela exclut donc la possibilité que Badier soit Le Gascon.
Une autre théorie propose que Le Gascon ait été, à un moment donné, un doreur travaillant pour l'atelier des Eve, une dynastie de relieurs parisiens réputés dont certaines créations présentent des similitudes stylistiques avec celles attribuées à Le Gascon. Toutefois, cette hypothèse manque de preuves concrètes et n'a jamais véritablement convaincu les spécialistes.
La piste de Jean Gillede
C'est finalement l'hypothèse de Roger Devauchelle qui semble offrir la piste la plus crédible et la plus fascinante. Devauchelle, une autorité en matière d'histoire de la reliure, s'est penché sur le cas de Jean Gillede, un autre relieur gascon. Selon lui, Florimond Badier pourrait ne pas être Le Gascon, mais il pourrait néanmoins jouer un rôle clé dans la résolution de l'énigme.
Florimond Badier, originaire du même pays que Le Gascon, aurait été formé par Jean Gillede, un relieur établi dans la région et reconnu comme maître en 1615. Ce qui rend cette piste particulièrement intéressante, ce sont les similitudes entre les reliures attribuées à Le Gascon et celles réalisées par Badier. Des comparaisons ont en effet révélé que les outils de dorure utilisés pour ces œuvres provenaient du même atelier, ce qui suggère une connexion directe entre les deux artisans.
Devauchelle propose que Jean Gillede, maître relieur, pourrait en réalité être Le Gascon. Sa réception en tant que maître en 1615 coïncide avec les premières mentions de la renommée de Le Gascon, et en 1622, dans le registre de la Confrérie des relieurs, le nom de Gillede apparaît en surcharge d'un "L", comme si l'auteur avait commencé à écrire "Le Gascon" avant de se corriger. Ce détail intriguant pourrait bien être la clé de l'énigme.
Le mystère de l'identité de Le Gascon demeure, mais les recherches approfondies et les théories comme celles de Roger Devauchelle nous offrent une perspective fascinante sur ce maître relieur du XVIIe siècle. Qu'il s'agisse de Jean Gillede ou d'un autre artisan dont le nom a été oublié, ce qui est certain, c'est que Le Gascon a laissé un héritage durable, non seulement par ses innovations techniques mais aussi par la beauté intemporelle de ses créations. Les livres anciens, témoins silencieux de ce passé, continuent de jouer un rôle central dans la découverte et la préservation de cet héritage, nous invitant à plonger toujours plus profondément dans l'histoire riche et complexe de la reliure.
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