Longtemps auréolé d’un mythe tenace, le Trésor des chartes – cet ensemble prestigieux des archives royales...
L’épanouissement du décor des dos à la grotesque.
La reliure, en tant qu’art, a traversé les âges en évoluant au fil des tendances esthétiques et des techniques. Parmi ces ornementations, le décor dit à la grotesque s’est imposé comme un style marquant et emblématique, en particulier à partir de la seconde moitié du XVIIᵉ siècle.
Une esthétique raffinée à base de palettes dorées
Le décor des dos à la grotesque se caractérise par une composition raffinée de palettes dorées appliquées sur l’ensemble du dos. Ces palettes, disposées les unes au-dessus des autres, présentent un motif complexe constitué de tortillons orientés dans le même sens. Les tortillons, souvent harmonisés en forme de vaguelettes, s’entrelacent gracieusement autour de petits points dorés, créant ainsi une texture visuelle riche et dynamique.
Si ce type de décor peut théoriquement être réalisé à l’aide de petits fers, aucun exemple concret ne semble attesté. Cela confère au décor une rareté technique qui participe à son attrait.
Les configurations adaptées au décor à la grotesque
Le décor à la grotesque trouve son plein épanouissement sur les dos lisses. Ces dos permettent une plus grande unité dans la disposition des motifs, avec pour seules interruptions des pièces de maroquin coloré, destinées à recevoir le titre et la tomaison. Ces pièces, souvent encadrées de filets dorés, remplacent les faux nerfs et ajoutent une touche d’élégance supplémentaire.
Toutefois, ce décor peut également orner des dos à nerfs, remplissant les compartiments entre ces derniers tout en évitant celui réservé à la pièce de titre. Dans certains cas, le titre est directement doré sur le cuir du dos, soit de manière traditionnelle, soit en long, comme l’illustrent certains exemples remarquables.
Les grands noms de la reliure à la grotesque
Plusieurs relieurs renommés ont contribué à la popularité de ce style. Parmi eux, on peut citer Jacques-Antoine De Rome, Nicolas-Denis Derome le Jeune et Antoine-Michel Padeloup. Ces artisans ont su maîtriser l’art du décor à la grotesque, faisant de leurs créations des œuvres uniques, précieuses et recherchées par les bibliophiles.
Évolutions et variations au fil des siècles
Au début du XIXᵉ siècle, une évolution notable dans l’ornementation des dos a émergé. Dans un esprit similaire, l’usage de fers reproduisant des résilles dorées a commencé à remplacer les palettes grotesques, jugées irrégulières. Ces résilles, appliquées entre des faux nerfs ou dans les compartiments, apportaient une esthétique plus homogène et moderne tout en conservant une richesse décorative. Par ailleurs, une variation proche du décor à la grotesque repose sur l’emploi de chaînettes dorées, disposées de manière identique, offrant une alternative harmonieuse et plus sobre.
Le décor des dos à la grotesque, avec ses motifs dorés et ses compositions complexes, témoigne d’une période florissante de l’art de la reliure. Associant savoir-faire technique et esthétique recherchée, il incarne une forme de raffinement qui continue d’inspirer et de fasciner les amateurs d’édition et de reliures anciennes. L’empreinte laissée par les grands relieurs de l’époque demeure une source d’admiration pour les passionnés d’histoire du livre et du patrimoine artistique.
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