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Un manuscrit enluminé de l'entourage de Jean Pucelle mis aux enchères à Lyon.

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La maison de ventes De Baecque & Associés s’apprête à organiser une vente aux enchères exceptionnelle en octobre à Lyon, mettant en lumière un trésor inestimable de l'art médiéval : un manuscrit enluminé rare et précieux, un livre d’heures réalisé vers 1325 dans l’entourage du célèbre enlumineur Jean Pucelle. Ce chef-d'œuvre de l’enluminure gothique, estimé entre 100 000 et 200 000 euros, promet d'attirer l'attention des collectionneurs, des historiens de l'art et des amateurs éclairés.

Ce livre d’heures, à l’usage de Rome, est composé de 222 feuillets. Il se distingue par la richesse de ses miniatures, la variété de ses encadrements et la diversité des heures présentes, ce qui suggère une commande prestigieuse, probablement d'origine royale. Parmi les éléments les plus remarquables de ce manuscrit, on retrouve des scènes emblématiques telles que l’Annonce aux bergers, ainsi que des initiales historiées représentant sainte Catherine, saint Paul, saint Jean-Baptiste, saint Jean évangéliste et sainte Geneviève. Les encadrements, dorés à la feuille, sont ornés de motifs végétaux comme des feuilles de vigne, de houx et de chêne, accompagnés de drôleries anthropomorphiques et zoomorphes qui confèrent une vivacité et une originalité particulières à l’ensemble.

Le contexte historique et artistique de ce manuscrit est tout aussi fascinant. Jean Pucelle, mort en 1334, est l'un des enlumineurs les plus influents du XIVe siècle. Son style, marqué par l'utilisation de la grisaille et la tridimensionnalité des représentations, a durablement influencé l'art de l'enluminure médiévale. Les nombreuses drôleries en grisaille qui ponctuent ce manuscrit témoignent de la vivacité et de l'humour caractéristiques de l'art de Pucelle, avec des personnages expressifs et des scènes parfois incongrues.

L'origine royale du manuscrit est suggérée par des marques héraldiques discrètes présentes dans l’ouvrage. Si l’on suit cette piste, Isabelle de France, fille de Philippe le Bel et épouse d’Édouard II d’Angleterre, serait la personne la plus susceptible d’avoir commandité cet ouvrage. Isabelle de France, connue pour son goût raffiné et son mécénat artistique, aurait donc pu être la commanditaire de ce somptueux livre d’heures, fusionnant ainsi les influences artistiques françaises et anglaises.

Outre son caractère artistique, le manuscrit contient des offices longs de la Croix/Passion et du Saint-Esprit, avec des variantes inconnues, ajoutant une dimension liturgique et historique à cet objet déjà exceptionnel. Cette vente aux enchères est une occasion rare pour les collectionneurs et les institutions de se procurer un témoignage précieux de l’histoire de l’art de l’enluminure au XIVe siècle.

Ce livre d’heures, véritable témoignage du génie artistique de l'époque, pourrait bien devenir la pièce maîtresse de la collection d'un heureux acquéreur en octobre prochain à Lyon.

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© Photo : De Baecque & Associés

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Commentaires

  • Provenance
    Par : Hervé Boulain le 06/07/2024
    5.0

    Bonjour, pourriez-vous éventuellement m'indiquer la provenance de cet ouvrage. Bien à vous.
    Hervé Boulain.

    Réponse de abao le 07/07/2024 Le manuscrit anonyme en question ne permet pas d'identifier clairement son destinataire, mais des marques héraldiques discrètes dans les initiales indiquent une piste intrigante. Les initiales montrent des motifs comme des fleurs de lys pour la France (f. 73, 148v, 205v), un lion d'or pour les anciennes armes anglaises (f. 46v, 94r, 215r), et un aigle d'or sur fond de gueules pour le comté de Bourgogne (f. 111v, 126r, 142r). Ces symboles suggèrent une origine potentielle liée à Isabelle de France, fille de Philippe Le Bel et épouse d'Edouard II d'Angleterre. Isabelle a séjourné en France entre 1325 et 1326, période durant laquelle elle aurait pu commander un tel manuscrit à Pucelle, reconnu pour son style simple et ses compositions iconographiques similaires à celles des œuvres contemporaines comme le Bréviaire de Jeanne de France et les Heures de Jeanne de Savoie. Bien que cette hypothèse soit plausible, l'identification précise du destinataire reste incertaine malgré les similitudes avec d'autres manuscrits attribués à Pucelle, comme le Bréviaire de Blanche de France et le Bréviaire de Jeanne d'Évreux.