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Les fondateurs et les premiers sociétaires de la Société des bibliophiles français : histoire, statuts et ouvrages marquants.
Fondée officiellement le 1er janvier 1820, la Société des bibliophiles français (devenue "Société des bibliophiles françois" à partir de 1846) est une institution emblématique du monde des amateurs de livres rares et précieux en France. Regroupant des bibliophiles passionnés, ses membres s’engageaient à préserver et à publier des œuvres devenues rares ou inédites. Ce projet collectif a marqué un tournant dans l’histoire de la bibliophilie en France, à une époque où la révolution industrielle transformait la production et la diffusion des livres.
Les premiers sociétaires et fondateurs
La société a été fondée par un groupe restreint d’hommes partageant une passion commune pour les livres anciens et de qualité exceptionnelle. Parmi les membres fondateurs, on compte notamment :
- Hippolyte de Châteaugiron, marquis et président de la Société, connu pour sa bibliothèque exceptionnelle et son engagement dans la préservation du patrimoine littéraire.
- Guilbert de Pixerécourt, secrétaire et célèbre dramaturge, surnommé "le Shakespeare des boulevards".
- Charles-Athanase Walckenaer, érudit, géographe et administrateur, qui a contribué à l’enrichissement de la collection avec des ouvrages rares.
- Alphonse de Malartic, administrateur d’État et bibliophile de renom.
- Durand de Lançon, collectionneur et amateur éclairé.
- Auguste Bérard, passionné des éditions elzéviriennes, connu pour son ouvrage sur ces imprimeurs célèbres.
- Édouard de Chabrol, linguiste érudit.
- Charles-Gilbert Morel-Vindé, pair de France, passionné d’agriculture et de livres rares.
Le cercle initial comptait vingt-quatre membres et s’ouvrait également à cinq associés étrangers, parmi lesquels figuraient des noms prestigieux tels que le prince Alexandre Labanoff à Saint-Pétersbourg et le comte Spencer à Londres.
Les statuts et le fonctionnement de la Société
Les statuts de la Société des bibliophiles français reflétaient l'exigence et le raffinement de ses membres. Voici les points saillants :
- Admission stricte : Toute personne souhaitant intégrer la Société devait être parrainée par deux membres et être élue au scrutin secret (article 3).
- Exclusivité et perfection : Aucun membre ne pouvait être libraire ou commerçant de livres (article 2), et les ouvrages imprimés par la Société devaient atteindre une perfection typographique exemplaire (article 13).
- Format et tirage limités : Les ouvrages étaient imprimés en grand in-octavo, avec des tirages limités à vingt-quatre exemplaires pour les membres, plus quelques exemplaires destinés à des institutions comme la Bibliothèque royale (articles 14 et 15).
- Publications annuelles : Chaque année, la Société publiait des ouvrages inédits ou rares, regroupés sous le titre de Mélanges publiés par la Société des bibliophiles français.
Les "Mélanges" et les trésors bibliophiliques
De 1820 à 1829, la Société publia six volumes de Mélanges. Ces recueils étaient composés de textes variés, anciens ou modernes, souvent inédits. Chaque pièce, imprimée séparément, portait un titre particulier, une pagination distincte et un numéro attribué au sociétaire propriétaire.
- Exemples d’œuvres marquantes publiées :
- Manuscrits rares de poésie ancienne.
- Traductions inédites d’auteurs grecs et latins.
- Textes d’écrivains modernes soigneusement annotés.
Avec seulement 26 exemplaires pour le premier volume et 30 pour les derniers, ces collections sont aujourd’hui des trésors extrêmement rares et prisés.
Les bibliothèques des membres fondateurs
La bibliothèque du marquis de Châteaugiron
La collection du marquis de Châteaugiron est souvent décrite comme l’une des plus belles de son époque. Elle comprenait des éditions rares de classiques grecs et latins, comme l’Horace édité par Combe et le César de Clarke, ainsi que des œuvres françaises comme La Nouvelle Héloïse annotée par Rousseau. La vente de sa bibliothèque en 1827, qui a rapporté 62 596 francs, fut un événement marquant dans le monde de la bibliophilie.
La bibliothèque de Guilbert de Pixerécourt
Connu pour son goût pour les reliures élégantes et les éditions rares, Pixerécourt possédait notamment des exemplaires sur vélin des classiques français et italiens. Ses livres portaient souvent un ex-libris original : « Un livre est un ami qui ne change jamais ».
La bibliothèque de Charles-Athanase Walckenaer
Spécialisée en géographie et histoire naturelle, la collection de Walckenaer comptait des cartes et manuscrits précieux, ainsi que des ouvrages littéraires du XVIIe siècle. Sa vente posthume en 1853 a produit près de 80 000 francs.
Héritage et influence
La Société des bibliophiles français a joué un rôle déterminant dans la valorisation des livres anciens et rares. Par son exclusivité et son raffinement, elle a fixé des standards élevés pour les collectionneurs et amateurs de livres. Ses Mélanges sont aujourd’hui des témoins précieux de l’engagement de ses membres pour la préservation et la diffusion du patrimoine littéraire.
Malgré la dissolution de la Société sous sa forme originale après 1829, ses membres ont continué à publier des ouvrages séparément, perpétuant l’esprit bibliophile dans un monde en mutation.
Conclusion
La Société des bibliophiles français reste un modèle d’excellence dans l’histoire de la bibliophilie. À travers leurs collections, publications et débats, ses membres ont contribué à sauvegarder un héritage culturel inestimable. En valorisant la rareté, la qualité et la perfection, ils ont laissé une empreinte durable dans l’univers des lettres et des arts.
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