Les œuvres de William Shakespeare continuent de réserver des surprises, même plusieurs siècles après leur rédaction....
Paul Louis Rossi : un poète entre ombre et lumière.
Le monde de la littérature a perdu l'une de ses voix singulières avec la disparition de Paul Louis Rossi le 6 février 2025. Lauréat du prix Mallarmé en 1995 pour son recueil Faïences, ce poète et romancier laisse derrière lui une œuvre riche, marquée par une exploration constante du langage et une sensibilité artistique profonde.
Gérard Cartier, coordinateur de la revue Secousse, lui rend hommage en ces termes : « C'était un grand poète, qui a suscité des amitiés et des admirations fidèles, malheureusement pas assez nombreuses. Souhaitons que sa malheureuse disparition soit l'occasion de le lire et de le relire. »
Né à Nantes le 4 novembre 1933, Paul Louis Rossi portait en lui un héritage complexe. Sa mère était bretonne, son père italien, victime de la barbarie nazie en 1943. Ce passé douloureux a sans doute nourri une partie de son regard sur le monde et influencé son rapport à l'écriture.
Une carrière marquée par la diversité des genres
Paul Louis Rossi débute sa carrière littéraire en 1958 avec Liturgie pour la nuit, une première incursion dans la poésie qui préfigure déjà son goût pour une écriture dense et musicale. Il participe ensuite à plusieurs revues littéraires influentes, notamment Action poétique et Change dans les années 1960 et 1970, où il affine sa voix et se mêle aux courants novateurs de la poésie contemporaine.
Sa production littéraire couvre un large éventail de genres. Il s'illustre aussi bien dans le roman que dans la poésie, le récit ou l'essai. Parmi ses romans les plus marquants, citons Régine (Julliard, 1990), La montagne de kaolin (Julliard, 1992) et La vie secrète de Fra Angelico (Bayard, 1997), autant de textes qui mêlent réflexion historique et poétique.
Dans le domaine du récit, À propos de Nantes et La voyageuse immortelle (Les Lettres françaises, 1969) ainsi que Les nuits de Romainville (Le Temps qu'il fait, 1998) illustrent une approche sensible du souvenir et de l'espace, où la narration s'entrelace avec l'introspection.
Un poète de l'expérience et du langage
C'est pourtant en poésie que Paul Louis Rossi trouve son terrain d'expérimentation privilégié. Dès Fontessa (Guy Chambelland, 1961) et Quand Anna murmurait (Guy Chambelland, 1963), il s'attache à travailler le rythme, le son, la musicalité des mots. Sa poésie est une quête d'harmonie entre le visible et l'invisible, un dialogue constant entre l'expérience et l'imaginaire.
L'un de ses recueils les plus célèbres, Faïences, qui lui vaut le prix Mallarmé en 1995, témoigne de cette recherche d'une écriture épurée, à la fois sensuelle et intellectuelle. Dans Les horizons égarés, recueil posthume annoncé pour avril 2025 chez Obsidiane, cette exploration se poursuit avec une intensité renouvelée.
Un regard critique sur le monde
En parallèle de son travail poétique et romanesque, Paul Louis Rossi a également signé des essais critiques d'une grande acuité. Dans L'Ouest surnaturel (Hatier, 1993), il interroge les mythes et les imaginaires de sa région natale. Les gémissements du siècle (Flammarion, 2001) et Les variations légendaires (Flammarion, 2012) poursuivent cette réflexion sur les interactions entre littérature, art et société, toujours avec une distance critique et une érudition jamais pesante.
Un artiste au carrefour des disciplines
Au-delà de l'écriture, Paul Louis Rossi nourrissait une passion pour les arts visuels, qu'il intègre à plusieurs de ses ouvrages. Il collabore notamment avec des peintres et photographes, comme en témoignent Sôteria (1979, avec Patrick Rosiu) et Regards croisés (2005, avec Pablo Volta). Son engagement ne s'arrête pas à l'édition : il participe à des créations radiophoniques pour France Culture, multipliant ainsi les formes d'expression pour donner corps à son univers.
Un dossier de la revue Nu(e) lui a été consacré, preuve que son influence ne s'est pas arrêtée aux cercles restreints des lecteurs de poésie.
Un héritage à redécouvrir
Si Paul Louis Rossi n'a pas toujours bénéficié de la reconnaissance qu'il méritait, son œuvre demeure une invitation permanente à la découverte. Sa disparition est une occasion de relire ses textes, de redonner vie à cette langue subtile et vibrante qu'il maniait avec tant d'élégance.
Dans un monde où la poésie semble parfois reléguée à l'arrière-plan, il nous rappelle que la parole poétique est un acte de résistance, une manière de voir et de dire le monde autrement. Paul Louis Rossi restera l'un de ces auteurs dont les écrits continuent d'éclairer les esprits curieux, loin des feux éphémères, mais dans une lumière intemporelle.
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