Les œuvres de William Shakespeare continuent de réserver des surprises, même plusieurs siècles après leur rédaction....
Décès de l'écrivain et journaliste René Grando.
René Grando, figure du journalisme du Sud-Ouest de la France, nous a quittés à l’âge de 76 ans. Cet homme à l'allure espiègle, avec ses mèches rebelles et son sourire taquin, donnait l’impression que le temps n’aurait jamais d’emprise sur lui. Hélas, à peine un an après la disparition de son épouse Marie-Claude, la mort nous prive d’un journaliste talentueux, d’un écrivain prolifique et d’un réalisateur engagé.
De Perpignan à la presse : une vocation forgée par l’expérience
Né à Perpignan, René Grando restera toute sa vie profondément attaché à ses racines catalanes. Son enfance, marquée par une nature rebelle et une indifférence certaine pour les études académiques, aurait pu le mener vers un métier manuel, comme celui d’ébéniste. Pourtant, son destin a pris une autre voie. Entré dans le monde de la presse par « la petite porte » en intégrant L'Indépendant, le quotidien catalan, René Grando débute modestement mais rapidement, il prouve qu’il possède une plume talentueuse et une capacité à rapporter les faits avec une précision rare.
Sa carrière prend véritablement son envol lorsqu'il rejoint la rédaction de La Dépêche du Midi, où il se distingue comme grand reporter, notamment en couvrant des affaires marquantes pour la région. Parmi elles, le hold-up retentissant de la Brinks à Toulouse en 1988, ou encore l’affaire des parachutistes de Francazal en 1989. Ces événements, tout en étant des faits divers, étaient traités par Grando avec un soin et une rigueur qui lui vaudront le respect de ses pairs et feront de lui un modèle pour les jeunes générations de journalistes.
Une plume littéraire marquée par l’histoire et la mémoire
Le talent d’écrivain de René Grando ne se limite pas à ses reportages. Marqué par l’histoire de la Retirada, l’exode massif des Républicains espagnols fuyant la dictature franquiste à la fin de la guerre civile, il consacra plusieurs ouvrages à cette tragédie humaine. Les camps de réfugiés, installés dans le sud de la France, où ces exilés furent accueillis dans des conditions souvent déplorables, sont au cœur de plusieurs de ses écrits. Grando ne se contente pas de relater des faits historiques ; il s’attache à humaniser ses sujets, à leur redonner une voix et une dignité. Son approche rappelle les grands chroniqueurs de l’histoire contemporaine, pour qui l’histoire ne se comprend que par le prisme des destins individuels.
L’amour qu’il portait à sa ville natale de Perpignan et à sa région se retrouve également dans ses romans policiers, un genre où son humour naturel transparaît à travers son héros, Germinal Poco. Celui-ci, personnage emblématique, mène ses enquêtes avec une légèreté malicieuse, dépeignant les ruelles de Perpignan avec un regard amoureux et gourmand. Ces romans, au-delà de l’intrigue, sont des hommages à une région qu’il connaissait intimement et qu’il savait rendre vivante à travers ses mots.
Un homme d’images autant que de mots
Si René Grando était un homme de plume, il était également un homme d’images. Sa carrière de journaliste l’a naturellement conduit à la télévision, d’abord à Barcelone, puis à Toulouse. En tant que réalisateur, il s’est notamment illustré en produisant des documentaires sur la République espagnole, un sujet qui lui tenait particulièrement à cœur. Ses films, tout comme ses livres, étaient imprégnés d’une volonté de rendre hommage à une mémoire collective souvent occultée, et de raconter l’histoire sous un angle humain et personnel.
Par ailleurs, sa carrière audiovisuelle s'est poursuivie avec succès, puisqu’il a présidé la chaîne toulousaine TLT (Télé Toulouse), où il a pu conjuguer son amour de l’image et son sens aigu de l’information. Ce rôle de président lui a permis de guider et de transmettre ses valeurs journalistiques à une nouvelle génération de reporters et de réalisateurs.
Un hommage à une figure incontournable du journalisme régional
Le départ de René Grando marque la fin d’une époque pour le journalisme du Sud-Ouest. Il laisse derrière lui un héritage précieux, non seulement par la qualité de ses écrits, mais aussi par la rigueur et l’intégrité qu’il a toujours su maintenir dans l’exercice de son métier. Ce goût pour l’investigation minutieuse, ce souci du détail et cette humanité qu’il savait insuffler dans chacun de ses articles, en font un modèle pour tous ceux qui ont eu la chance de croiser son chemin.
René Grando n’était pas simplement un journaliste ou un écrivain ; il était un témoin de son temps, un homme dont les œuvres resteront gravées dans la mémoire collective de tous ceux qui s’intéressent à l’histoire de la Catalogne et de l’exil espagnol. Son œuvre littéraire, tout comme ses documentaires, sont autant de témoignages d’un homme profondément attaché à sa terre et à ceux qui l’ont façonnée.
Ainsi, à travers ses nombreux écrits, ses reportages, ses romans et ses documentaires, René Grando nous laisse en héritage un précieux corpus qui fait écho aux souffrances, aux espoirs et aux luttes d’une époque, tout en célébrant les valeurs universelles de liberté, de justice et de mémoire.
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